Chronique par Franpi Barriaux sur SunShip (23 avril 2018)

Vinny Golia, ce n’est pas que cette longue chevelure blanche à faire pâlir tous les chauves de mon espèce. C’est aussi -voire surtout en réalité, mais quand même- un musicien polymorphe, saxophoniste généreux et puissant, mais également à l’aise aux clarinettes, au basson, aux flûtes… Pour aller vite et reprendre sa définition, l’usage des bois, dont il s’est fait le spécialiste, tant dans le domaine de la creative music que dans la musique contemporaine. On se remémorera ses compositions for Large Ensemble, enregistré en 1982 ou un incroyable solo capté en 1980. Plus proche des obsessions de ces pages, on le découvrait également au ténor dans le Creative Orchestra de Braxton en 1978, notamment à Köln.
Une sacré carte de visite, qui brille encore aujourd’hui, avec Oliver Lake, Weasel Walter ou Lisa Mezzacappa.
Le disque qui nous concerne aujourd’hui est une édition d’un concert capté à Los Angeles en 1979, pile entre sa participation au Grand Orchestre de Braxton et sa propre expérience en grand format. Mais ce disque est un quartet. Doit on dire quatuor ? Il n’y a que des soufflants qui s’escriment comme il s’expriment dans une forme chambriste extrêmement élaboré où chacun des solistes convergent comme par une force centrifuge inextinguible qui mène à un point central en constante fusion.
Pour résumer, c’est doux, c’est fin, mais on s’en prend plein les oreilles.
Si le doute persiste, se passer « #2″, sur le premier set, où l’alchimie des timbres et cette phrase obsessionnelle qui hante le morceau capte immédiatement l’attention
Pour accompagner Vinny Golia, on retrouve deux habitués du label Dark Tree, qui édite presque naturellement ce document. Il s’agit du clarinettiste John Carter et du cornettiste Bobby Bradford, qu’on avait déjà entendu dans NoUturn. Bertrand Gastaut, le patron du label est un spécialiste de la West Coast, et ce concert en est un pur produit. Du moins l’un des exemples de ce qui a pu se faire de meilleur dans le creuset de Los Angeles. On est à peine surpris de voir le tromboniste Glenn Ferris clore le angles du carré. Le tromboniste, plus pertinent que jamais offre une grande souplesse et ses discussions récurrentes avec Bradford sont l’un des moment les plus intense de cette brillante rencontre, où le son n’accuse pas le poids des ans.
On peine à savoir où donner de la tête, tant les interpellations sont partout, à l’instar du ronflement incessant de la clarinette basse sur « Views », ou la trame pleine de finesse de « Chronos 1″, en équilibre constant entre le sifflement abrupt et la mélodie riche, passant de l’un à l’autre comme pour mieux s’affranchir de toutes postures attendues et d’offrir à Golia, au milieu des envolées collectives de formidables occasions de briller dans la foultitude de ses instruments.
Live at The Century City Playhouse est une belle pièce, d’autant que les notes de pochettes nous font découvrir tout une époque (et la passion de Glenn Ferris pour les Volvo). Indispensable.

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