Chronique par Olivier Ledure dans Improjazz (juin 2015)

Après quatre réalisations contemporaines, françaises pour l’essentiel, Dark Tree se penche vers le passé, 40 ans en arrière précisément. Et, ce vaillant petit label s’attache à documenter la discographie d’un duo de musiciens qui a collaboré plus d’un quart de siècle ensemble : j’ai nommé Bobby Bradford, trompettiste et, surtout, cornettiste et John Carter, saxophoniste et, surtout, clarinettiste.
Un aparté sur Dark Tree : ce choix de nom de label par Bertrand Gastaut, son fondateur, fait référence au titre éponyme d’Horace Tapscott. Il m’a avoué que ses intentions premières de producteur étaient d’éditer des inédits du pianiste californien. Mais, cela ne s’est pas encore fait ! Par contre, l’accord fut quasi immédiat avec Bobby Bradford.
Si j’en crois Discogs, ce serait la huitième ou neuvième référence de ces deux hommes qui ont été autant enregistré par des labels européens (Black Saint, Emanem et Hat ART) qu’américains (Flying Dutchman, Nessa et Revelation Records). Notons que Roberto Miranda, un des deux contrebassistes, fit longtemps partie du collectif UGMAA dirigé par Horace Tapscott. Et, pour achever les présentations, j’ajouterai que Stanley Carter est le fils de John Carter.
Soulignons ensuite la qualité d’un splendide livret de 16 pages qui ne comprend pas moins de 14 photographies, pour l’essentiel de Mark Weber (par ailleurs, auteur des notes de pochette),  mais aussi de Gérard Rouy et de Jak Kilby. Sans oublier la magnifique affiche du concert. De l’excellent travail de producteur, en résumé !
Mais, la musique dans tout ça, me répondrez-vous ? Patience, j’y arrive !
Disons-le tout de suite : la musique est formidable ! C’est à la fois vraiment free et extrêmement mélodieux, et, de plus, enregistré en concert : en d’autres termes, c’est tout ce que j’aime !
Cinq titres, dont deux tournent autour des vingt minutes chacun : l’album s’ouvre sur l’un de ces deux-là, Love’s Dream. C’était le titre qui ouvrait également l’album éponyme enregistré au Chat qui Pêche par Martin Davidson, deux ans auparavant. Plus long, joué un peu plus rapidement avec deux contrebassistes au lieu d’un (le trop mésestimé Kent Carter) et John Carter remplaçant Trevor Watts. Ces deux morceaux méritent tout à fait, à aux seuls, les achats de ses deux excellents CD.
Surtout qu’un autre titre, presqu’aussi long que le premier évoqué, est commun à ces deux albums : Comin’ On, et, même davantage, car il figure deux fois, joué à un jour d’écart vraisemblablement, sur le label Emanem. Et, c’est l’inverse du constat précédent : alors que les deux américains, après l’exposé de la mélodie et leurs courts solos, laissent le champ libre aux autres musiciens (Miranda, S. Carter et Jeffrey), le premier solo parisien de Trevor Watts est suivi de celui de Bobby Bradford, puis les autres (Kent et John) avant le final. Et, le second Comin’ On est encore bien différent du premier tant les deux anglais (Trevor et John) font preuve de leur inventivité.
Et quelque plaisir d’entendre John Carter et Bobby Bradford s’enrouler autour de l’un l’autre, sur leurs mélodies (bien évidemment) ! Et dire que le fiston Carter, William, a abandonné la contrebasse pour devenir gardien de sécurité…
A présent, vous dire ce qu’il vous reste à faire serait superfétatoire !

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